Moins médiatisé et plus feutré que le débat sur le mariage homosexuel, la loi sur l’ANI fait toutefois l’objet de luttes intenses tant le projet est contesté. Un des points de l’accord national interprofessionnel (ANI) signé le 11 janvier 2003 était de généraliser l’obligation pour toute entreprise, quelle que soit sa taille, de souscrire à une complémentaire santé pour ses salariés. Cet engagement a trouvé sa concrétisation dans un projet de loi qui a été présenté au conseil des ministres du 6 mars. Qui est pour ? Qui est contre ? Revue des forces en présence.

Dernier rebondissement de l’ANI : le Conseil constitutionnel rejette les clauses de désignation

Depuis l’annonce de l’Accord National Interprofessionnel, l’instauration des clauses de désignation fait débat et nombreux sont ceux qui s’y opposent. Les agents généraux, les courtiers et les assureurs sont majoritairement contre ces clauses et ont exprimé leur opposition par de nombreux recours. Suite à ce débat, le Conseil constitutionnel a tranché et a décidé de rejeter ces clauses, ce qui n’a pas tardé à créer une vague de satisfaction des courtiers et assureurs.

On constate cependant que les avis ne sont pas tous positifs suite à cette décision du Conseil constitutionnel. Les institutions de prévoyance n’ont pas bien accueilli la nouvelle et s’inquiètent des conséquences de cette décision pour les petites entreprises. Celles-ci restent toutefois satisfaite d’une telle avancée sociale.

CONTRE l’ANI

– Gérard Bapt, député PS

La majorité sur ce texte n’est pas acquise dans les rangs du parti socialiste. Ainsi, Gérard Bapt, député PS et spécialiste de la santé, a fait savoir au président de son groupe son opposition au projet de généralisation de la complémentaire santé. Selon lui, la mesure envisagée, en bénéficiant aux seuls salariés, va favoriser les contrats collectifs qui profitent déjà d’importantes niches sociales et fiscales.

– Apac et Syndicat 10

L’association pour la promotion de l’assurance collective (Apac) et le Syndicat 10 (association de courtiers) sont également vent debout contre cette clause qui aurait, selon eux, pour effet de renforcer la position dominante des institutions de prévoyance qui pourront à terme imposer leurs conditions, et qui menacerait directement 30 000 emplois dans les entreprises de courtage, chez les agents généraux et dans les mutuelles. Ces deux organisations ont fait savoir qu’elles chercheront à influencer le débat parlementaire pour que le texte soit amendé sur ce point. Et si la bataille parlementaire est perdue, le président de l’Apac a annoncé que son organisation envisagerait d’ouvrir la bataille contentieuse en saisissant l’Autorité de la concurrence. Il l’a d’ailleurs déjà saisi, mais seulement pour avis, et il devrait défendre son dossier devant elle le 28 mars.

– Hervé de Veyrac, président d’Agéa

Le président d’Agéa, la fédération nationale des syndicats d’agents généraux d’assurance, est allé à la rencontre de plusieurs sénateurs pour déposer les pétitions qu’il a recueilli de plus de 5300 agents généraux. L’objectif de ces rendez-vous étant de faire comprendre aux sénateurs les positions d’Agéa sur différents points de l’ANI signée au début de l’année 2013 pour tenter de faire bouger les choses. Agéa s’élève contre cette nouvelle loi et dénonce notamment les clauses de désignations incluses dans ce texte.

– Alain Morichon, président de la CSCA

La chambre syndicale des courtiers d’assurances dénonce l’adoption du texte de loi et les conséquences que cela va avoir sur la qualité des garanties des mutuelles. En effet, Alain Morichon souhaite rapidement informer et avertir le rapporteur du Sénat de cette situation qui risque d’engendrer une hausse des prix des complémentaires santé. Ainsi, on risque de voir des mutuelles avec de moins bonnes garanties plus chères, une aberration que tente de prouver le CSCA. De plus, cela pourrait avoir un impact négatif sur le dialogue social au sein des entreprises.

POUR l’ANI

– Laurence Parisot, présidente du MEDEF

Le MEDED est pour l’ANI dans on ennemble car l’accord apporte un surcroît de flexibilité aux entreprises. Toutefois, concernant l’article 1 et la généralisation de la complémentaire santé à tous les salariés, nombreuses sont les voix qui s’élèvent contre l’introduction dans le projet de loi d’une clause de désignation dans les accords de branche. C’est notamment ce que dénonce le MEDEF qui, par l’entremise de sa présidente, Laurence Parisot, a fait savoir, qu’il ne retrouvait pas l’accord initial. Lors de son point presse mensuel de mars 2013, Laurence Parisot a, en effet, affirmé qu’initialement les entreprises souhaitaient pouvoir choisir leur complémentaire et que c’est ce qui avait été prévu dans l’accord. Le MEDEF rejette donc l’idée d’une désignation par branche qui ferait perdre à l’entreprise sa liberté de choix.

– Jean-Louis Faure, président du CTIP

Le centre technique des institutions de prévoyance (CTIP), via l’intermédiaire de son président Jean-Louis Faure apporte son soutien à l’Accord national interprofessionnel (ANI) favorable aux salariés. Celui-ci explique que la généralisation de la complémentaire santé est une réelle avancée et une reconnaissance importante pour les salariés et aussi pour les entreprises. Il tient à préciser que cet accord « est socialement et économiquement efficace ».

Il révèle de plus que la négociation des mutuelles de groupe permettra des tarifs bien plus intéressants jusqu’à 30 % moins chère qu’une complémentaire santé individuelle avec les mêmes garanties, c’est pourquoi le CTIP s’avère être favorable à la clause de désignation des instituts de prévoyance.

– Charles Relecom, Président de Swiss Life

Deux ans auparavant, la Macif a conclu un partenariat avec l’institut de prévoyance AG2R, qui aujourd’hui s’avère être un réel avantage puisque les IP devraient être privilégiés pour obtenir des contrats lors des désignations de branches. Ainsi, le Président de Swiss Life reconnait qu’un partenariat de ce genre pourrait vraiment être intéressant et qu’il souhaiterait d’ailleurs rapidement se rapprocher d’un IP avant la mise en place de la loi. Swiss Life préfère donc chercher à s’allier plutôt que de s’élever contre cette loi.

– Jacques Barthélémy, avocat conseil

Avocat conseil en droit social et ancien professeur, Mr Barthélémy explique l’intérêt et la nécessité de la généralisation de la complémentaire santé pour tous les salariés. Il s’agit d’un dispositif réellement efficace, économiquement et socialement pour protéger les employés et aussi sécuriser l’emploi de manière générale. Il dénonce les sociétés d’assurances qui critiquent l’accord signé le 11 janvier 2013 qui sont pour lui des critiques totalement injustifiées.

NUANCÉS

– Le groupe Istya de complémentaire santé

Le groupe Istya, qui est une union mutualiste rassemblant le groupe MGEN, la MNT, la MGEFI, la MCDef et MAEE a émis 4 suggestions qu’il verse au débat parlementaire : mettre en place des « contrats responsables collectifs obligatoires ou individuels choisis par les salariés », s’aligner sur la fonction publique territoriale avec le modèle des contrats labellisés, conditionner les aides fiscales à des « critères renforcés » pour des « couvertures responsables », prolonger la couverture des complémentaires lors du départ à la retraite, en mutualisant ce besoin de financement entre opérateurs.

– Autorité de la concurrence

Après avoir été saisie, l’Autorité de la concurrence a rendu ses préconisations publiques pour assurer une concurrence effective entre les acteurs du domaine des complémentaires santé. Parmi ces préconisations, l’Autorité de la concurrence souhaite qu’il y ait une égalité entre les organismes d’assurances, une liberté pour l’entreprise de choisir son organisme d’assurance, un choix possible dans les désignations entre plusieurs organismes ainsi qu’une mise en concurrence de ces entreprises d’assurances.

– Cabinet de conseil Jalma

Dans le premier observatoire de financement des soins en France, le cabinet Jalma dévoile l’importance de l’ANI dans le domaine de la santé et prévoit un important bouleversement sur ce marché. De nombreux français vont passer à un contrat collectif ce qui va considérablement réduire le marché de la mutuelle individuelle. D’autre part, Jalma dénonce les critiques envers les clauses de désignation en indiquant qu’il ne s’agit pas du bon combat. En effet, les députés avaient pour objectif d’assurer le libre choix aux différentes branches et ces clauses permettent d’assurer cette liberté. L’Autorité de la concurrence a d’ailleurs confirmé que ces clauses étaient légales.

– Pierre Cahuc, Stéphane Carcillo et André Zylberberg

Suite à l’adoption de l’ANI le 14 mai dernier, on constate que l’intégration des clauses de désignation ont fortement favorisé les syndicats des institutions de prévoyance. Afin de faire passer cet accord, le gouvernement a comme souvent attribué des primes à quelques partenaires sociaux. Pierre Cahuc, Stéphane Carcillo et André Zylberberg dénoncent cette gestion du dialogue social qui n’est pas en faveur des salariés et qui nuit considérablement aux syndicats. Ceux-ci regrettent cette conception du syndicalisme et prennent pour exemples la situation dans d’autres pays où le dialogue social peut être très puissant lorsqu’il n’est pas « manipulé » par un financement ambigu.

Chef d'entreprise

Sources : AFP, APAC, Syndicat 10

Votre prochaine assurance

Choisissez
Mutuelle Santé Mutuelle Frontalier Mutuelle Entreprise Assurance de Prêt Prévoyance des TNS Assurance Obsèques Assurance Capital Décès Assurance Dépendance

Votre navigateur est obsolète !

Veuillez mettre à jour votre navigateur pour visiter ce site correctement. Mettre à jour maintenant

×