Lors des États généraux de la Santé et de la protection sociale des jeunes, vendredi 31 janvier 2014, la question de la faible mobilisation des jeunes pour les élections mutualistes a été abordée. L’enjeu est de taille : renforcer la légitimité de la gestion étudiante à l’heure où la LMDE est d’un coté attaquée par la Fage et UFC-Que choisir, qui réclament la fin de la délégation de gestion du régime de santé des étudiants, et, de l’autre, par Emevia et la Smerep, qui pointent ses erreurs de gestion.
Le fonctionnement actuel des mutuelles étudiantes
La gestion du RSSE (Régime de Sécurité Sociale Étudiant) a été confiée depuis 1948, date de sa création, à des mutuelles étudiantes. La gestion et le versement des prestations sont actuellement délégués à deux grandes mutuelles étudiantes : Emevia, un réseau de onze mutuelles régionales depuis 1972, et une mutuelle nationale (La Mutuelle des Etudiants, LMDE) depuis 2000.
La LMDE accusée de mauvaise gestion par Emevia et la SMEREP
La Cour des comptes a récemment jugé trop élevés les frais de gestion de la LMDE, ex-Unef. De leur côté, la Fage, un syndicat étudiant, et UFC que Choisir dénoncent également les erreurs de gestion et l’inefficacité des mutuelles étudiantes en général par rapport à la gestion des CPAM. La SMEREP, mutuelle étudiante, et Emevia ont réagi à cette attaque en rejetant les accusations de mauvaise gestion pour leur propre activité, et en les reportant sur la seule responsabilité de la LMDE : « C’est elle et elle seule qui a généré un déficit colossal et qui est à l’origine de la majorité de ces mécontentements en raison de ses nombreux dysfonctionnements dans la gestion des soins de ses étudiants. Sa situation a jeté le discrédit sur l’ensemble des mutuelles étudiantes et semé une grave confusion ».
La LMDE doit améliorer sa communication auprès des étudiants
La LMDE est appelée à renforcer ses efforts en matière de communication auprès des étudiants pour mieux les impliquer, et ainsi conserver sa légitimité. La présidente de la LMDE, Vanessa Favaro, admet que l’implication des étudiants constitue un défi de première importance pour la mutuelle, reconnaissant au passage que le taux de participation de 10 % aux élections de la mutuelle n’était pas « satisfaisant ».
La LMDE doit renforcer la légitimité de la gestion étudiante
De son côté, la LMDE s’interroge sur la manière de sensibiliser les étudiants aux problématiques de protection sociale, afin de les amener à plus s’impliquer dans la gestion de la mutuelle étudiante. L’enjeu : renforcer la légitimité de la gestion étudiante à l’heure où la LMDE est critiquée de toutes part. C’est un avertissement qu’exprime Francis Kessler, directeur du Master DPSE (droit de la protection sociale d’entreprise) de l’Université de Paris 1 : « vous devez faire un effort au niveau de votre fonctionnement démocratique, même si je sais à quel point il est difficile de faire s’impliquer des étudiants. Mais, si vous ne faites pas ce travail, vous ne serez plus légitime ».
Les étudiants s’étonnent aujourd’hui qu’on puisse leur demander leur avis
Selon Vanessa Favaro, la faible implication des étudiants serait également liée à une « confusion » entretenue entre le fonctionnement des mutuelles et des assurances privées : « Les jeunes ne comprennent même plus aujourd’hui qu’on puisse leur demander leur avis. Ils ont tellement intégré le fait que la complémentaire santé relève du domaine marchand qu’ils s’étonnent qu’on puisse leur demander leur avis sur la manière dont doit fonctionner le système ». Dénonçant la progression du « consumérisme » et la « défiance » se diffusant chez les jeunes à l’égard de toute forme d’organisation collective, Vanessa Favaro conclut que, « si on n’y prend pas garde, c’est toutes les mutuelles qui seront confrontées à ce problème de renouvellement de leurs adhérents. »
La Fage et UFC Que Choisir réclament la fin de la délégation de gestion du régime de santé des étudiants et le retour des CPAM
Dans une pétition mise en ligne le 30 janvier 2014, la Fage et UFC Que Choisir réclament la fin de la délégation de service public accordée aux mutuelles étudiantes, et proposent le rapatriement du régime des étudiants dans le régime général.
Les CPAM peu adaptées aux spécificités du public étudiant
Francis Kessler doute néanmoins de la capacité de l’assurance maladie à reprendre le régime étudiant tout en diminuant les frais de gestion liés à son fonctionnement. « Comment pourrait-elle, avec un personnel permanent, gérer avec suffisamment de souplesse un régime subissant de forts pics d’activité, notamment avec les inscriptions de septembre ? ». Il existe un grand risque que le rapatriement du régime étudiant dans le régime général engendre de nombreuses difficultés.
L’UNEF et la LMDE souhaitent le retour à un opérateur unique
De leur côté, le syndicat étudiant l’UNEF et la LMDE ont présenté leurs propres revendications, dont la demande d’un retour à l’opérateur unique pour la gestion du régime étudiant. Cela permettrait de faire des économies budgétaires et apporterait une meilleure lisibilité pour ses usagers. La fin de la concurrence de gestion avec le réseau Emevia permettrait également de supprimer les frais consacrés aux campagnes de communication commerciale auprès des étudiants.
Mais cette proposition ne semble pas non plus être la solution aux maux actuels des mutuelles étudiantes…
La SMEREP quitte le réseau Emevia pour cause de divergence de point de vue |
La mutuelle étudiante régionale Smerep (Société mutualiste des étudiants de la région parisienne) a décidé de quitter le réseau Emevia au mois de décembre 2013. Elle reproche aux dirigeants d’Emevia de ne pas avoir suffisamment défendu le régime étudiant lors du dernier rapport de la Cour des comptes. Selon la SMEREP, le réseau Emevia aurait dû insister sur le fait que les dysfonctionnements constatés étaient dûs au fonctionnement spécifique de la LMDE, et non de l’ensemble du réseau de mutuelles. La SMEREP indique également qu’Emevia n’a pas suffisamment appuyé le fait que, avec 52 euros par étudiant pour la délégation de gestion, la majorité des mutuelles étudiantes étaient compétitives, et étaient aussi compétitives que certaines CPAM.La SMEREP, qui a décidé dorénavant de se représenter elle-même, insiste sur le fait que cela ne remet pas en cause les liens de la première mutuelle régionale avec les autres mutuelles étudiantes. |